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L’Homme Eternel, de Gilbert Keith Chesterton

S’il est des œuvres immenses, inspirées, qui par leur poésie et leur profondeur peuvent attiser la foi même chez le plus acerbe des athées, L’Homme Eternel (The Everlasting Man dans sa version originale) de G.K. Chesterton pourrait assurément être la première. Initialement conçue par l’auteur comme une réponse à la vision de l’histoire progressiste et relativiste de The Outline of History (1920) de son contradicteur et ami H.G. Wells, l’œuvre transforme cet imposant prétexte en l’illustration de la grande aventure de l’humanité et du sens catholique de l’histoire.

Formellement, L’Homme Eternel est découpé en deux parties : la première s’attache à la description et à l’analyse de l’épopée païenne des hommes, là où la seconde ouvre naturellement sur sa suite chronologique, l’histoire de ces-derniers au lendemain de la révolution que fut l’avènement du Christ.

Encensé dès sa parution par les plus grands contemporains de son auteur, dont George Orwell, Ernest Hemingway, H.G. Wells et J.R.R. Tolkien, c’est indubitablement C.S. Lewis qui restera le plus marqué par l’ouvrage. Ce-dernier, pourtant athée militant depuis ses jeunes années, se convertit après la lecture de L’Homme Eternel, comme frappé par le Divin. Il décrivit plus tard dans ses correspondances l’œuvre comme « la meilleure défense populaire du christianisme » qu’il connaissait. Dans la volonté du SOCLE de définir les fondements de la grande Tradition européenne et ce qu’elle a donné de plus grand, il n’était désormais plus possible de passer à côté de ce monument de l’apologétique chrétienne du début  XXe.

 

Vaslav Godziemba, pour le SOCLE

La critique positive de L'Homme Eternel au format .pdf

 

L'Homme Eternel, Gilbert Keith Chesterton, christianisme, antiquité, Rome, foi, sciences

 

 « Tous les hommes qui dans l'histoire, ont eu une action réelle sur l'avenir, avaient les yeux fixés sur le passé. »

Gilbert Keith Chesterton, Ce qui cloche dans le monde

 

I.  Gilbert Keith Chesterton, le gai catholicisme

 

Gilbert Keith Chesterton – GKC – (Londres, 29 mai 1874 - Beaconsfield, 14 juin 1936) est l’auteur incontournable de l’apologétique catholique anglaise. Homme aux mille facettes, il est célébré à la fois comme un écrivain, un poète et un philosophe, un critique d’art et de littérature piquant, et un orateur de renom. Né au sein d’une famille très pieuse et mystique, il est baptisé selon le rite anglican. Le jeune Chesterton, garçon vif et curieux de tout, se posa très tôt les questions métaphysiques, existentielles et spirituelles qu’il glosera toute sa vie. A l’âge de 22 ans, il se convertit officiellement au catholicisme, abandonnant ainsi l’église d’Angleterre, qu’il considérera plus tard n’être que la « pâle imitation » de l’Eglise Catholique Romaine. S’engageant dans une carrière journalistique à partir de 1902, il commentera et critiquera sévèrement jusqu’à sa fin cette déshumanisation et ce désenchantement qu’il diagnostiquait dans la montée du matérialisme et de l’individualisme du monde moderne.

Esprit pétillant, à la fois grave et léger, armé d’une plume aussi implacable que gouailleuse, il pourrait pratiquement faire penser à un de ces hobbits décrit par Tolkien dans ses manières, mais habité de l’âme des hommes qui humanisent leurs semblables pour ses travaux. Son biographe français François Rivière le décrit comme « l'écrivain anglais le plus réjouissant et le plus inventif de l'époque édouardienne ». Si le grand public le connait surtout pour la fameuse série des enquêtes du père Brown, fiction policière imprégnée de foi chrétienne, ce sont sans conteste les essais tels qu’Hérétiques (1905), Orthodoxie (1908) et bien sûr L’Homme Eternel (1925), monuments d’apologétique, qui feront de lui un immortel de la littérature européenne et chrétienne. Toute sa vie il s’attachera à la défense d’un catholicisme enraciné, respectueux d’une immanence quasi-païenne et imprégné par la joie et l’émerveillement devant le spectacle du monde. Il savait à cet égard reconnaitre les dérives nihilistes et aliénantes que pouvait engendrer un christianisme dévoyé et débilitant. La postérité s’en souvient au travers de sa sentence, souvent mal comprise et rarement bien citée, tirée du chapitre III de son essai Orthodoxie : « Le monde moderne est saturé des vieilles vertus chrétiennes virant à la folie. »

A la fin de sa vie, le pape Pie XI le décorera de l'Ordre de Saint-Grégoire-le-Grand, en hommage à sa défense de l’Eglise, du dogme et de la pensée chrétienne. G. K. Chesterton s’éteint le matin du 14 Juin 1936 en sa maison de Beaconsfield. Franz Kafka, grand admirateur de Chesterton et dont il appréciait particulièrement l’humour, déclara un jour non sans malice : « Cet homme est tellement joyeux qu'on se dit qu'il a dû rencontrer Dieu ». Si l’Eternel existe, nul ne doutera qu’à la fin de la matinée de ce 14 juin, c’était chose faite.

 

 

II.  Critique Positive de L’Homme Eternel de Gilbert Keith Chesterton

  

   Ce n’est pas un animal, c’est une révolution !

 

Le prétexte et le propos. Voilà en somme les deux principaux sillons que G.K. Chesterton se propose de creuser en introduction de L’Homme Eternel. Le prétexte est l’impératif de répondre aux errements d’une vision de l’histoire progressiste, matérialiste et hautement relativiste qui avait dramatiquement enflé à l’issue de la première guerre mondiale. Celle-ci se retrouvait alors dans The Outline of History de H.G. Wells. La thèse de celui-ci, pour les questions qui importent ici, peut se résumer comme tel : essentiellement, l’Homme n’est qu’un animal parmi d’autres, et ne diffère que par son degré d’évolution inhérent à une adaptation, et en aucun cas par sa nature ; spirituellement et culturellement, le Christ est un mythe parmi d’autres, Jésus n’est rien de plus qu’un prédicateur, au demeurant talentueux, et le christianisme une religion parmi d’autres, une secte ayant réussi le jour où un pouvoir politique a décidé de se l’approprier et lorsque le temps et l’habitude l’ont fait rentrer dans les mœurs. « Rabâchage de lieu commun » pour Chesterton, qui devenait habitué à entendre ces thèses partout, à mesure que la mode de l’historicisme scientifique et matérialiste tardait de s’évanouir.

Le propos de Chesterton s’émancipe du prétexte dès le départ, le dépasse et le sublime. Il est la description et l’analyse de « la grande aventure humaine », ou a minima celle de l’homme européen, aventure païenne puis chrétienne. Aventure qui, en plus de répondre point par point aux historicismes précédents, permet de découvrir un sens, en tant que signification et en tant que direction, à la place de l’Homme au cœur de la Création.

 

L’histoire de l’Homme commence dans une grotte, à la manière de la philosophie de Platon. Elle est celle de l’homme des cavernes, celui que les paléontologues nommaient alors « Pithécanthrope ». La préhistoire a toujours mis la science en difficulté permanente selon GKC. Là où le physicien peut toujours confirmer ou infirmer la chute des corps en vertu de l’invariance des lois de l’Univers, le paléontologue ne peut que produire par inférence et recoupement une série de caractéristiques qui seraient plus ou moins probablement celles de nos ancêtres communs. Plus que jamais à l’époque de l’auteur, celle d’un darwinisme hyper-dogmatique en roues libres, les préhistoriens ont la « fâcheuse tendance » de tirer par induction et analogie une multitude de conclusions sur l’homme des origines. En particulier, il leur apparaissait évident que ces hommes, tant dans leur mœurs que dans leur productions, étaient des sauvages de première catégorie, tout juste capable de s’entretuer pour la bête qu’ils venaient de tuer à coup de pierres grossièrement taillées. Pour GKC, il faut se garder des conclusions hâtives : rien ne disait en l’état actuel des connaissances scientifiques d’alors que « Pithécanthrope fut une brute épaisse ». Il y a selon lui quelque chose de sophistique et d’éminemment malhonnête à ne pas être « avare de conclusions sur la barbarie des chaînons manquants à partir d’un fémur et d’une dent ». Il convient plutôt à cet égard de partir du peu de certitudes disponibles afin de bâtir une anthropologie solide. Et dans cette affaire il y a une information absolument certaine : nos ancêtres éloignés exerçaient l’Art. Ils peignaient et ornaient les parois de ces grottes de gigantesques fresques, où s’entremêlent des représentations de la nature et des représentations d’animaux, de chimères et d’hommes, naissantes, vivantes, agonisantes et mourantes. Là où la fonction même de la caverne apparait encore à l’heure actuelle obscure (était-elle un foyer, un simple refuge ou a contrario un temple sacré, ou plusieurs de ces combinaisons en même temps ?), les peintures rupestres fondent des certitudes. Elles sont le témoignage de la solitude et de la grandeur de l’Homme par rapport à l’ordre animal d’avant. De tous les êtres vivants, l’Homme seul possède un sens esthétique et religieux, lui seul peut s’interroger, découvrir, espérer, « songer et songer à ses songes », lui seul peut « voir la mort en face » et « sentir l’ombre de la Mort » indique Chesterton. Les avancées actuelles en paléogénétique ont beau faire acter l’idée d’une continuité sans accro de l’archéobactérie à l’Homo Sapiens (il n’est pas question par ailleurs de remettre en cause sans argument rationnel les fondements de la théorie de l’Evolution), rien ne permet de contredire le fait que rappelle GKC : « Entre l’Homme et le reste, il y a des différences de degré, mais aussi une différence de nature ».

 

L'Homme Eternel, Gilbert Keith Chesterton, christianisme, antiquité, Rome, foi, sciences

Figure 1 : « [Les peintures rupestres] sont le témoignage de la solitude et de la grandeur de l’Homme par rapport à l’ordre animal d’avant.»

Fresque des lions de la grotte Chauvet, Auteur(s) inconnu(s) (Vers 33000 av. J-C)

 

En avançant un peu plus sur la voie de l’aventure humaine, comme une lueur semble poindre à l’horizon : la civilisation. Celle-ci se met alors à balbutier, puis prend de l’épaisseur et s’affirme en domptant la Terre. Pour les mêmes raisons convoquées au sujet des hommes des cavernes, apparait pour GKC regrettable et fallacieuse cette manie analogique de vouloir faire des premiers régimes politiques des despotismes sanguinaires et des tyrannies radicales. Les archéologues, bercés des mêmes lunes progressistes et des mêmes égarements heuristiques que leurs confrères paléontologues, concluaient hâtivement de l’immaturité et de la barbarie des premiers âges en politique et dans les affaires culturelles. Les civilisations raffinées et complexes que furent Babylone, l’Egypte, la Grèce, la Rome Antique ou le monde celte, pour les exemples cités par l’auteur, contredisent sans poser de problèmes la première thèse. Comme Claude Lévi-Strauss le soulèvera plus tard dans Race et Histoire, croire que les constructions de l’esprit étaient en général plus naïves et simplistes chez les premiers européens que chez nos modernes relève de la véritable naïveté et d’une inférence simpliste. Pour s’inspirer d’un exemple célèbre, il faut déployer un génie d’inventivité et d’ingénierie pour construire des vaisseaux spatiaux capables de partir de Terre pour aller explorer l’Univers, cela est entendu ; mais le premier homme à avoir, de ses mains seuls, construit une amphore en terre cuite, possédait un trésor d’inventivité et de génie comparable aux premiers. Que l’individu urbain moderne, n’ayant jamais vu d’argile brut de sa vie, s’y essaye ! Il comprendra rapidement qu’en plus d’être en soi un exercice aussi subtil que complexe, il l’est d’autant plus si aucune science des matériaux n’a jamais été écrite avant son essai. Ainsi les productions civilisationnelles primordiales, pour primitives qu’elles nous apparaissent avec l’accumulation des savoirs, sont probablement celles qui ont nécessité l’effort d’innovation le plus profond.

 

   L’heureux berceau païen du christianisme

 

Commence, avec l’éveil de l’homme au monde et sa prise de conscience au cœur des premières cités de son essence dual, à la fois être de nature et de culture, la grande épopée humaine qu’est le paganisme antique. Chesterton affirme au départ de sa réflexion que « le paganisme est fondamentalement un, malgré ses variations considérables ». Il est le fruit quasiment universel et immédiat de l’esprit humain, et représente selon lui à cet égard « le seul vrai rival de l’Eglise du Christ »[a]. L’auteur affirme néanmoins que pour ces considérations, la discipline qu’est l’étude comparée des religions accuse des défauts définitifs, le processus de comparaison et d’analyses des divergences et convergences souffrant de limites indépassables. Si l’on ne devait prendre qu’un seul exemple pour l’illustrer, il faut tenter de comparer les spiritualités d’Extrême-Orient avec le christianisme. Ici, les mots mêmes de religion, d’âme ou de Dieu comme entendus en Europe ne trouvent aucun équivalent en Asie ! Et les différentes variantes du bouddhisme ou le confucianisme ont plus de rapport avec nos notions de philosophie, voire de psychologie, qu’avec l’ensemble des religions occidentales.

A la place, GKC propose de distinguer ce qu’il nomme « les manifestations de la religion spirituelle », qui sont au nombre de quatre : Dieu, les dieux, les démons et les philosophes. Chacune de ces notions seront détaillées à mesure des besoins de notre critique. Dans la vision apologétique de Chesterton, il y a une trace, dans tout polythéisme, d’un « principe unificateur », unique, intemporel et immuable, placé au-dessus de la multitude des dieux. Qu’il s’appelle fatum, ou cosmos dans les paganismes européens, « l’Un » dans les mystiques platonicienne ou aristotélicienne, ou allant chercher hors d’Europe, le « Grand Esprit » chez les amérindiens, ou encore Brahma et son rêve chez les hindouistes, il est le régisseur primordial de la Création, et les dieux comme les hommes lui sont soumis. Les sources antiques des origines laissent ainsi à penser que tout polythéisme semble porter en lui la déclinaison, ou la multiplication, d’un monothéisme primordial autour duquel il s’abreuve en même temps qu’il l’efface. Ainsi le grand dieu Pan, comme son nom le suggère, « ne devint le dieu des bois qu’après avoir été le dieu du monde », tel qu’il perdurait encore intact dans la tradition orphique de la Grèce antique.

 

L'Homme Eternel, Gilbert Keith Chesterton, christianisme, antiquité, Rome, foi, sciences

Figure 2 : « Pour Chesterton, il y a une trace, dans tout polythéisme, d’un « principe unificateur », unique, intemporel et immuable, placé au-dessus de la multitude des dieux »

La chute des géants, Francisco Bayeu (1764)

 

Pour Chesterton, cette trace plus ou moins effacée de monothéisme est le témoignage admirable que le monde païen « cherchait » un Dieu unique, caché au plus intime de leurs mythes et de leurs cosmogonies, enfoui dans leurs réflexions mystiques et philosophiques. Les traductions contemporaines des textes antiques rendent ici hommage à cette quête inconsciente, faisant apparaitre le terme Dieu, là où il est reconnu qu’aucun autre n’aurait pu prendre sa place. Ainsi Socrate quittant ses juges : « Je vous mourir et vous allez vivre, Dieu seul sait qui de nous prend le meilleur chemin ? » ; Marc-Aurèle dans ses Pensées au sujet d’Athènes : « Pourraient-ils dire chère cité de Crécops, que tu ne dises point chère cité de Dieu ? » ; ou encore Virgile dans ses vers : « Ô vous qui avez connu des fardeaux plus terribles, à celui-là aussi Dieu donnera une fin ? ».

 

Chesterton était un grand admirateur de la pensée antique, et respectait en elle les plus beaux ouvrages qui allaient donner forme à l’Europe. Néanmoins il manquait pour lui au paganisme cette capacité de combler l’âme des hommes dans son intégralité. Le païen ne se retrouvait ainsi jamais rassasié religieusement, seule son imagination l’était. La célèbre citation du cinquième chapitre résume ici solidement la position de GKC sur cette question : « Le paganisme est une tentative pour atteindre les divines réalités sans le secours de la raison, et par la seule vertu de l'imagination. » C’est d’ailleurs l’occasion pour l’auteur d’un éloge de ce qui à ses yeux constituent la plus puissante part de la culture antique : le polythéisme comblait admirablement le poétique et le besoin de mythes en l’Homme, jamais en revanche le religieux. L’homme de la civilisation préchrétienne devait donc trouver ce lien sacré ailleurs, tel que naturellement dans l’Amour de sa patrie, de sa terre et des siens. Il trouvait alors un palliatif existentiel, mais toujours extérieur à son culte. Il mourrait pour Rome, il mourrait pour l’Empire, pour la gloire, ou pour son fils, mais il ne mourrait jamais « Pour Zeus et Athéna ». Et Chesterton de conclure que cette lacune intrinsèque au polythéisme fut l’une des causes majeures de son dévoiement et de son délitement, bien avant l’avènement du Christ et la propagation de son message.

 

Un autre effort particulier du monde préchrétien marque la pensée apologétique de Chesterton. Si l’on embrasse d’un regard l’Histoire Antique, d’aucun pourrait croire que le monde païen ait « préparé » l’Europe au christianisme, et qu’une certaine volonté divine n’y fut pas étrangère[b]. Les chrétiens forment ainsi une dette éternelle principalement envers Rome, mais aussi envers Athènes et l’entièreté du monde européen antique. Sur quoi se fonde cette préparation et par ricochet cette dette ? GKC l’affirme sans ambages : certes l’empire a pu être rude et sanguinaire, anti-chrétien et d’une morale douteuse sur son déclin. Reste qu’il n’aurait jamais pu atteindre dans ses mœurs le paroxysme immonde d’un univers alors déjà décrit comme parfaitement démoniaque : la cité de Carthage, et ses nations satellites. Car Carthage, sous des apparats de volupté et d’opulence paisible, cachait un culte qui révulsait romains comme chrétiens plus tard. Les sacrifices d’enfants en flux tendu au maitre du panthéon des carthaginois, Baal ou Moloch, une sorte de Saturne ayant mal tourné, ou la pratique de l’anthropophagie y étaient la norme, et des coutumes débridées et barbares étaient les dénominateurs communs du culte qui avilissait cette civilisation. Coups de tonnerres des plus retentissants de l’antiquité, les guerres puniques[c] étaient devenues pour Rome au fil des batailles bien plus qu’une leçon sur l’honneur ou un débouché stratégique et économique au sud de la Méditerranée.

 

L'Homme Eternel, Gilbert Keith Chesterton, christianisme, antiquité, Rome, foi, sciences

Figure 3 : « [Rome] n’aurait jamais pu atteindre (…) le paroxysme immonde d’un univers (…) parfaitement démoniaque : la cité de Carthage, et ses nations satellites. »

Hannibal franchissant les Alpes, Bénédict Masson (v. 1860)

 

Les sources romaines nous font encore sentir l’honnête frayeur des citoyens illustres de Rome lorsqu’ils scrutaient la grande Carthage. Il ne s’agissait plus pour eux de gagner une énième guerre de position, mais bien d’éradiquer le mal absolu, et d’annihiler les démons qui ne demandaient qu’à se répandre en Europe. Ainsi Rome sentait, sans doute pour la première fois à cette intensité, qu’il fallait moralement se battre.

 

L’épilogue fut heureux : en 146 av. J-C, après un siège de près de trois ans, Carthage fut réduite à néant, et son souvenir fut emporté. Avec cette victoire, Rome avait préparé un monde plus humain à l’avènement du message chrétien. Et quoique la frontière qui sépare christianisme et paganisme puisse apparaitre à certains difficilement franchissable, des ponts demeurent. Les mots de conclusion de GKC à l’illustration du conflit entre Rome et Carthage sont de ces ponts exemplaires et admirables : «  Les dieux s’étaient levés, les démons avaient fui, mais la victoire restait à des vaincus – à des morts, pourrait-on presque dire. Nul ne comprendra pleinement l’histoire romaine ni la façon dont la Ville s’installa au rang suprême qui paraît lui revenir de droit, s’il ne garde pas en mémoire les heures d’angoisse et d’humiliation où elle persévéra dans son témoignage à cet esprit qui est comme l’âme de l’Europe. […]  Nous devons nous féliciter de l’endurance de Rome au temps des guerres puniques : nous lui devons que la grâce divine, à l’heure qu’elle s’était fixée, se soit répandu sur un monde humain et non point inhumain. […] Si le passage du paganisme au christianisme fut un pont en même temps qu’une brèche, nous le devons à ceux qui gardèrent son humanité au monde païen. Grâce à eux, nous pouvons aujourd’hui penser au paganisme presque sans effroi, et presque avec douceur à ceux qui furent nos pères ; (…) nous sommes reliés par le rire et les larmes aux temps qui ne sont plus, et dont nous nous souvenons sans honte. C’est avec tendresse que nous voyons le crépuscule tomber sur la ferme sabine et les dieux familiers se réjouir lorsque Catulle enfin revient à Sirmio. Delenda est Carthago. »

 

Le paganisme avait vaincu les démons orientaux et le carthaginois Baal-Moloch. Rome se retrouvait alors sans rival. Cependant le nouvel ennemi de Rome couvait depuis un temps en son sein comme le cancer incurable du plus grand guerrier : le paganisme mourrait, et Rome et sa civilisation avec lui. La société antique vieillissante, elle se faisait trop complexe. Les cultes, qui jadis dans l’ancienne Cité reliaient les hommes au cosmos et enchantaient leur monde, se rétrécissaient à leur seule fonction sociale. La poésie virgilienne illustre de ses notes mélancoliques l’atmosphère qui régnait alors : les temples, qui hier irradiaient les sujets de Rome de leur autorité inaliénable, ressemblaient désormais à des pagodes orientales, où les couleurs criardes persistaient autant que l’ivresse des représentants du polythéisme. La poésie mythologique de l’antiquité versa ainsi irrémédiablement vers l’insupportable, avant de s’effondrer sous les fardeaux accumulés.

 

C’est dans ce marasme que le monde païen accueillit avec autant de questions que de stupeurs les premiers chrétiens, ces extraterrestres qui croyaient dur comme le fer que Dieu était un homme mort. Pour Chesterton, la mythologie antique créa en ces temps « un vide » dans le cœur du monde, vide « qui aurait asphyxié l’humanité si la théologie n’avait pris sa place » selon lui. La pensée de Chesterton invite à y voir un autre signe de la volonté du Très-Haut. A la thèse héritée des premiers persécuteurs des chrétiens qui affirme que « Le Grand Pan mourut parce que le Christ était né », il répond malicieusement que la vérité historique et spirituelle du monde se retrouve en inversant la cause et l’effet : « Le Christ naquit parce que le Grand Pan était mort ».

 

   Aube de l’étable, aube du tombeau

 

A l’instar de l’histoire de l’Humanité, l’histoire du christianisme commence dans une grotte. Le premier Noël, naissance du Sauveur, s’est moins déroulé dans une étable que dans une caverne de Galilée. Chesterton interroge : qu’est-ce dont que cet évènement ? Il est une lueur qui changea définitivement la face du monde, et dont le message deviendra le plus singulier et la plus puissante des nouvelles jamais annoncées. Avec la nativité, l’infiniment grand rencontre l’infiniment petit, le transcendant l’immanent, le pouvoir absolue la plus fragile incapacité. « La Toute-Puissance dans les langes », comme le décrit poétiquement GKC. Avec Dieu fait homme, le grand horloger, pressenti par les païens, prend corps et chair pour venir à notre rencontre, à la rencontre de l’Homme. Avec Dieu fait homme, l’humanisme nait. L’individu se pare d’une dignité que jamais il n’eût auparavant, et le monde change de centre de gravité. Des innombrables conséquences éthiques qui en découleront, la plus remarquable pour l’époque réside sans doute dans le rapport que les esprits entretenaient avec l’esclavage. Monnaie courante, nécessité fondamentale des sociétés ancestrales dans lesquelles la source d’énergie première provenait du travail du corps, l’esclavage devint moralement inacceptable, et ce, indépendamment des distinctions que les sociétés opéraient. L’égale dignité de l’entièreté du genre humain face à Dieu fait homme défendait le libre citoyen d’asservir les peuples conquis.

Plus fondamentalement, la naissance de Jésus est le point final des recherches respectives de l’intelligence et de la fable, de la philosophie et de la mythologie. La présence des bergers, gardiens secrets du savoir cosmique, et des rois mages lors de l’épiphanie, sages parmi les sages, attestent de ce but accompli. L’Eglise, garante des mystères de la Nativité, achève donc de répondre à toutes les questions du monde. Selon GKC, il n’y a à cet égard pas de système plus exhaustif et parfait dans sa complétude que le christianisme. Thomas d’Aquin pouvait comprendre Aristote, et même raffiner sa pensée, il n’est pas certain qu’Aristote ait compris un traitre mot de la somme théologique du premier.

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Figure 4 : « Avec la nativité, (…) avec Dieu fait homme, le grand horloger, pressenti par les païens, prend corps et chair pour venir à notre rencontre, à la rencontre de l’Homme. »

Adoration des bergers, Bartolomé Estéban Murillo (1668)

 

Enfin Noël ne peut se comprendre sans évoquer qu’il fut aussi un combat, une lutte à mort cosmique entre le malin et le peuple de Dieu. Hérode, roi oriental romanisé, cherchait à tuer Jésus nouveau-né, tel « l’ombre de Moloch » qui réapparaissait une dernière fois hanter la Terre. GKC parle de cet « atmosphère indescriptible » que tout européen ressent lors des veillées de l’Avent depuis deux mille ans, « comme un parfum tenace et une nuée qui se dissipe après une explosion triomphale ». Pour l’auteur, trois éléments distincts de façon unique dans la Nativité montrent à tout égard qu’elle fut une révolution. Le premier, « le désir spontané commun à tous les hommes, que le ciel soit, au sens littéral, un foyer » ; le deuxième, « une philosophie plus ample que toutes les autres », faisant preuve « d’une subtilité et d’une capacité d’adaptation qu’aucun évènement humain ne peut surprendre » ; enfin le troisième, « une résistance et un combat », proclamant « la paix sur la terre » et n’oubliant « jamais pourquoi le ciel a connu la guerre ».

 

De même que dans la première partie de l’œuvre, GKC a prouvé que considérer l’Homme comme un animal comme les autres apparaissait douteux, il s’attache à démontrer que considérer le Christ comme un lambda l’est encore plus ! Difficile cependant de sortir de son inconscient chrétien d’européen pour lire comme avec des yeux neufs le Nouveau Testament. Il s’agit là néanmoins de l’exercice auquel GKC va se soumettre. Que pouvait bien y lire le néophyte païen des premiers siècles ? Les plus grandes surprises proviennent directement du caractère littéralement  surnaturel de Jésus de Nazareth. D’ordinaire, l’Eglise a coutume de présenter ce dernier comme « doux et humble de cœur ». Là est son enseignement le plus classique. En réalité, quand on s’y penche, en essayant de faire abstraction de ce que l’on sait – ou croit savoir – autant que faire se peut, on retire du caractère et de la personne de Jésus « un sentiment de mystère » pouvant parfois frôler le dérangeant. Ses « gestes imprévus », ses « silences énigmatiques » et ses « répliques ironiques », mais aussi ses « remarques saisissantes », ses « blâmes sévères », ses « histoires d’une beauté surprenante », devaient laisser à un lecteur aux yeux neufs la marque d’un ton qui n’a rien de banal. Le lecteur païen qui découvrit le Nouveau Testament serait ainsi surpris d’y trouver des solutions si audacieuses, parfois incongrues, aux difficultés de la vie. Il se rendrait compte alors que Jésus était plus qu’un original : le monde qu’il promettait et l’enseignement qu’il prêchait ne se retrouvaient pas dans « l’esprit de son temps ». Certes l’époque ne savait plus que faire de la pléthore de rabbis mystiques qui voulaient alors accomplir la parole des prophètes de l’Ancien Testament. Mais avec une radicalité telle que celle du Christ ? Jamais.

Il est à noter que GKC met expressément de côté ici les miracles et se concentre sur les « petits riens » des Evangiles, tel que le fait incongru que le ministère terrestre du Christ commença à l’aube de ses trente ans[d]. Pourquoi ce long silence ? Peut-être que la préparation à une telle épreuve nécessitait la longueur. L’auteur rappelle à cet effet qu’il ne fait aucun doute que « d’un certain point de vue », « l’Evangile est une énigme dont l’Eglise donne la réponse ». L’enseignement de l’Eglise parachève finalement la lecture brute de l’Evangile, donnant les clés des paroles sibyllines de Dieu.

Jésus apparait désormais comme éminemment surhumain, en tant qu’il possède à la fois les qualités d’un humain, et les dépasse. D’aucun pourrait croire dès lors que Jésus était un aliéné pour être l’incarnation de Dieu lui-même. Il s’agit là d’un regard porté sur le Nouveau Testament par le prisme de la psychanalyse moderne (combien de fous dans les asiles se pensent divins !). Mais le discours du Christ est bien plus et bien moins à la fois que celui d’un aliéné. Force est de constater que si fou il fut, il était un fou particulièrement singulier. Si singulier que son enseignement dure depuis maintenant vingt siècles ! La thèse parait bien bancale. Rome, pourtant défenseuse de la beauté et du bien face aux démons africains qui menaçaient la civilisation jadis, s’était lavés les mains du meurtre de l’Homme. Grandeur et décadence. Elle demandait, celle-là même qui se disait au centre de l’Univers, par la voix de Pilate : « Qu’est-ce que la Vérité ? » A quel faible d’esprit, à quel fou, la puissance du monde civilisé demande-t-elle l’unique question qui vaille ?

Quant au mystère de la Résurrection, fin du voyage humain de Dieu, il gêne même les plus brillants esprits, et participe de la singularité du christianisme. Cette étape est l’acte d’un jour nouveau qui a tué l’ancien monde. Laissons GKC s’exprimer ici : « C’était la fin d’une très grande aventure, de cette histoire humaine qui n’était qu’humaine. Les mythologies et les philosophies reposaient là. Selon la belle expression romaine, les dieux, les héros et les sages avaient vécu. Ils avaient vécu en mortels et ils étaient morts. Le troisième jour, dès l’aube, les amis du Christ vinrent au tombeau. (…) Ils avaient devant les yeux une nouvelle création (…). Et Dieu, sous l’apparence d’un jardinier, se promenait une nouvelle fois dans le jardin, à la fraicheur non du soir mais de l’aube. »

 

   La singularité miraculeuse du christianisme

 

Contrairement aux thèses actuelles souvent entendues, il n’y a rien qui puisse faire songer que le christianisme antique était puéril, barbare ou naïf, ou même plus « pur » que celui qui vient après. GKC répond dans cette avant-dernière partie à la thèse qui énonçait que le christianisme fut l’étape ultime de la décadence de la civilisation romaine, en s’aidant du « témoignage des hérétiques ». Pour l’auteur, cela revient à reprocher à l’Eglise ce qu’elle-même reproche aux hérésies : d’être des « modes » de fin de règnes et de mondes, des signes de décadence. Notons au passage l’engouement pour les spiritualités orientales de nos contemporains nihilistes, qui, pour combler leur vide existentiel, se ruent comme les mouches sur la dernière tendance « zen » qu’offres les magazines. Or le christianisme ne « passait pas » comme l’arianisme avant lui.

De même il est courant d’entendre que le christianisme serait une forme de « retour de balancier » de la débauche et des mœurs romaines des ultimes jours de l’Empire. Il serait l’ennemi de la chair, une sorte d’anéantissement des sens, et reposerait « sur une vision pessimiste de l’Univers pour laquelle l’existence était un mal. » Ses accusations sont réfutées aisément par l’histoire vérifiable des combats de l’Eglise contre les hérésies. Pourquoi diable celle-ci a-t-elle combattu si ardemment et point par point les hérésies qui prêchaient précisément ce que les tenants de la thèse lui reprochent ? Pourquoi a-t-elle combattu si farouchement les donatistes si elle était pessimiste ? Pourquoi a-t-elle été si dure avec les manichéens si elle était véritablement manichéenne ? Aucune de ces postures, poussées à l’extrême d’égarements doctrinaux et mystiques, n’avait rapport avec la tempérance de la Foi chrétienne authentique.

Un autre argument rationaliste est ici mis en lumière par GKC. Celui-ci affirme que le christianisme se serait imposé « par le haut », car devenu la religion officielle de l’Empire. Là encore, les présupposés sont faciles à ébranler. Si le pouvoir était la seule et unique condition à l’imposition d’une doctrine, l’arianisme aurait pris comme une mauvaise herbe dans le jardin romain. Bien au contraire, le christianisme s’est imposé par le bas. En particulier par la volonté des martyrs, ayant répandu telles les eaux de l’Alphée la Parole, purifiant les écuries d’Augias qu’étaient devenue la vieille Rome.

En conclusion de cette défense, GKC rappelle l’évidence : on ne prolonge pas « un tour de passe-passe seize siècles » durant. Il y a quelque chose de simplement miraculeux, « qui marche » sur le plan spirituel, qui touche au plus intime de la nature humaine, dans le message du Christ.

 

Pour GKC, une certitude déjà évoquée revient en filigrane de ses dernières réflexions : le christianisme est absolument unique. Lorsque l’on tente de le comparer aux autres spiritualités du monde, on se heurte à un mur conceptuel et doctrinal indépassable. Il en va ainsi du peu d’analogies que l’on peut espérer faire avec la « religiosité » des cultures asiatiques. Pour l’auteur, l’Asie est un vieil homme qui s’est « perdu dans l’éternité », pris à errer dans une roue cosmique où le temps et l’espace se remplissent et se tarissent périodiquement. Le vieil homme étend son âme dans le Grand Tout, persuadé de n’être convaincu de rien, broyant son individualité dans une forme de nihilisme seulement modéré par les bizarreries des mythes desquels il couvre ses pensées.

A contrario, l’Europe est jeune de sa Renaissance, de son sens divin de l’Histoire. Elle « ne s’est pas contentée de vieillir », « elle est née une seconde fois. » Si le continent n’avait pas connu la Révolution que fut le message divin, elle se serait engluée dans une mortification que l’Asie porte toujours. Ici revient l’assertion du départ sur la naissance du Christ : le christianisme est le parachèvement à la fois de la philosophie et de la mythologie, car il est une histoire vraie. Sa valence d’histoire satisfait le berger, sa valence de vérité convainc le sage. Et Chesterton de conclure : « Sans [le christianisme], les deux fractions de la pensée humaine seraient restées divisées (…). Seule une incarnation, une incorporation divine de nos songes, pouvait combler cet abime – quelqu’un dont le titre soit plus haut que celui de prêtre et plus ancien même que la chrétienté : Pontifex Maximus, le plus grand des jeteurs de pont. »

L'Homme Eternel, Gilbert Keith Chesterton, christianisme, antiquité, Rome, foi, sciences

Figure 5 : « Il y a quelque chose de simplement miraculeux, « qui marche » sur le plan spirituel, qui touche au plus intime de la nature humaine, dans le message du Christ. »

La Séparation des Apôtres, Charles Gleyre (1845)

 

 

III.  Conclusion : l’espoir combattant, ou la voie de salut du Peuple de Dieu

 

Conclure à la suite d’une lecture attentive et fascinée de l’Homme Eternel n’est pas aisé. L’œuvre, pierre angulaire des travaux de son auteur, est tel le phare dans la tempête du doute pour son lecteur, chrétien ou non. Là où le monde moderne a déclaré une guerre totale au sens, à la raison et à la foi, l’Homme Eternel sonne la revanche et la résistance de la Tradition chrétienne, enracinée, fière et consciente d’elle-même.

 

Le dernier chapitre, Les Cinq morts de la Foi, est emblématique de cette lutte, soutenue par l’espoir du renouveau : la plus belle des vertus théologales. Depuis l’avènement du Créateur sur Terre et durant deux millénaires d’existence, la Foi européenne est morte à maintes reprises et renaquit plus solide et ardente. Comment expliquer qu’elle soit encore partagée par le peuple de Dieu après la chute de la scolastique, la Réforme, les Lumières, l’avènement des millénarismes postchrétiens dont les pires parasites furent le communisme et le scientisme ? « Il y a toujours de l’espoir ». Voilà le mot d’ordre de Chesterton.

 

Paré de cette conviction inébranlable, à la fois cœur et voie de sa foi, le chrétien européen ne saurait faillir. Nos pères, aux côtés tant de Jean III Sobieski que de François d’Assise, savaient se forger une armure de cette vertu, un bras armé et un cœur.

 

 

Sachons être dignes d’eux et de leurs martyrs !

 

 

Pour le SOCLE

 

  • L’Homme est le seul être de la Création connu à ce jour possédant un sens esthétique, historique et religieux. Il y a donc une différence de nature entre l’Homme et le reste.

 

  • Les premières civilisations européennes, contrairement à ce que l’on peut croire de prime abord, ont déployé un raffinement culturel et civilisationnel dont la profondeur n’a rien à nous envier.

 

  • La trace de monothéisme présent dans le paganisme antique semble le témoignage que les hommes « cherchait » le Dieu unique, caché dans leurs mythes et leurs philosophies.

 

  • Avec sa victoire contre les démons carthaginois et orientaux, Rome a préparé un monde plus humain à l’avènement du message chrétien et pour la venue du Christ.

 

  • La naissance de Jésus est le point final des recherches respectives de l’intelligence et de la fable. Le christianisme est l’achèvement de la philosophie et de la mythologie.

 

  • La vérité fabuleuse rencontre la vérité rationnelle dans le christianisme, réconciliant les deux appareils de la pensée humaine de façon unique dans l’Histoire humaine.

 

  • Les reproches de manichéisme, de pessimisme, de mortification, de connivence avec le pouvoir impérial et donc d’imposition « par le haut » sont tous battus en brèche par l’exemple historique des hérésies que combattaient l’Eglise. Elles se réclamaient des thèses que l’on reproche à celle-ci.

 

  • Les combats du peuple de Dieu et des martyrs au cours de l’Histoire doivent rappeler que la paix est un combat, et que l’espoir de renouveau est un devoir absolu pour le croyant.

 

 

  Notes

 

[a] Le regard que porte Chesterton sur le paganisme apparait d’importance dans le cadre des travaux du SOCLE. Il est celui d’un chrétien qui savait reconnaitre, sans sacrifier la Vérité du dogme, l’apport colossal de la vision païenne du monde à la culture. Ce respect de la part antérieur au Christ de l’entité Europe, mérite ici toute notre attention.

 

[b] Tel est en tout cas l’avis de l’auteur. N’oublions pas qu’il s’agit là d’apologétique. C’est à prendre ou à laisser ! Si lecteur attentif de Chesterton vous êtes, touchés ou non, vous ne resterez sans doute pas indifférent à la profondeur de ses lignes quoi qu’il en soit.

 

[c] Les guerres puniques sont le nom donné aux conflits entre l’Empire Romain et la civilisation carthaginoise. Généralement présentés aux nombres de trois, elles émaillèrent durablement l’Histoire des peuples méditerranéens durant les IIIe et IIe siècle avant J-C.

 

[d] Pour rappel, le canon indique que le Christ meurt à l’âge de trente-trois ans.

 

 

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